Traduction automatique : leurre ou économie ?
Do it yourself (DIY) : une tentation compréhensible
DIY or not? Traduction automatique ou traducteur professionnel ? That is the question!
La post-édition consiste à corriger les sorties d’un système de traduction automatique (TA) afin de produire une traduction de qualité. Par souci d’économie, certaines entreprises décident de post-éditer elle-mêmes plutôt que de confier la tâche à un professionnel de la traduction.
Passer un message d’une langue à une autre est cependant un processus délicat. Notamment parce que le degré de qualité attendu détermine directement le temps que vous devrez allouer à ce travail pour répondre aux exigences de qualité totale ou encore TQM (Total Quality Management).
Si vous êtes plusieurs personnes à vous répartir le travail, ce temps sera variable selon le niveau de compréhension de chacun. L’aisance rédactionnelle à reformuler une traduction dans sa langue natale sera également variable.
Au regard des progrès de l’intelligence artificielle et des économies attendues, la question du « Make or Buy » se pose.
Les moteurs tels que DeepL laissent entrevoir la possibilité de subroger la subtilité des langues vivantes par la machine. Les résultats, bien qu’inégaux, sont parfois époustouflants mais parfois aussi déconcertants. (lire notre article sur l’I.A)
Voici donc quelques données objectives pour vous aider à évaluer les risques et les opportunités de la post-édition.
Sans passer par une machine, un traducteur natif traduit en moyenne 300 mots/heure. En principe, l’utilisation d’une traduction automatique doit vous permettre de traduire au moins 400 mots par heure. Prenons un exemple, sur une longueur de contenu de 1000 mots, vous allez théoriquement passer :
• 2h30 à retravailler les propositions de la machine
• un temps variable à faire relire votre traduction par quelqu’un d’autre.
On peut tirer une conclusion rapide sur le fait que vous devriez réaliser des économies significatives. Mais si une traduction automatique vous fait gagner moins de 30 % du temps , il faut vous poser la question de son réel intérêt pour votre entreprise. Non seulement le gain économique est incertain mais il n’est pas rare que la relecture d’un document déjà traduit par un tiers prenne autant de temps que la traduction effectuée directement par un traducteur professionnel.
DeepL : apparences trompeuses
Malgré une apparente fluidité de DeepL, on se rend parfois compte des inexactitudes et incohérences entre les textes. Celles-ci peuvent créer une ambiguïté dans l’interprétation et conduire à des incompréhensions. Votre challenge consiste ici à saisir les nuances entre les documents cible et source. Vous risquez de passer à côté d’erreurs de sens préjudiciables.
Citons deux exemples, extrait d’un article de Guillaume Deneufbourg, pour illustrer la fluidité de la production DeepL. Les deux phrases traduites par la machine semblent de prime abord plutôt convaincantes. Mais en y regardant de plus près la première ne veut pas dire grand-chose et la deuxième contient un terrible contresens.
(Source : Discours de Barack Obama durant la COP21)
“So our task here in Paris is to turn these achievements into an enduring framework for human progress”
“Notre tâche ici à Paris est donc de transformer ces réalisations en un cadre durable pour le progrès humain”.
« Notre tâche ici à Paris est donc de transformer ces réalisations en un véritable modèle de progrès humain » semble plus approprié.
“We stand united in solidarity to deliver justice to the terrorist network responsible for those attacks but to protect our people and uphold the endurable values that keep us strong and keep us free.”
“ Nous sommes unis dans la solidarité pour rendre justice au réseau terroriste responsable de ces attaques, mais aussi pour protéger notre peuple et défendre les valeurs durables qui nous maintiennent forts et libres.”
En français « deliver justice » veut dire exactement le contraire de l’anglais à savoir « reconnaître les mérites de », « réparer le mal qui a été fait ».
Traduction automatique + éditeur + relecteur : un trio gagnant?
Une relecture s’impose-t-elle ?
Si la relecture fait majoritairement la preuve de son efficacité, son efficience est beaucoup plus incertaine. En effet, les résultats obtenus ne sont pas forcément à la hauteur du temps qui lui est consacré ni du coût qu’elle entraîne.
Il faudra veiller à faire de cet exercice de « correction » parfois redouté par la personne qui a traduit un véritable travail de collaboration avec la personne qui corrige.
Dans certains cas, la relecture croisée en binôme peut s’avérer utile et performante. La relecture croisée est un processus simple : un traducteur lit sa traduction à haute voix à un collègue (traducteur ou réviseur) qui suit sur le texte original.
Cependant, la relecture croisée peut aussi se faire avec une tierce personne (traducteur ou non) qui relit la traduction à haute voix tandis que le traducteur vérifie sur le texte original qu’il a bien rendu l’intégralité du sens. Une hésitation chez le lecteur est souvent le signe d’une maladresse de construction ou d’une ambiguïté sémantique. De plus, certains défauts (des répétitions par exemple) s’entendent à l’oreille mieux qu’ils ne se voient. Dans le meilleur des cas, ce travail à quatre yeux et quatre oreilles permet de relire 2 000 mots à l’heure. Il s’avére très efficace si tant est que l’on dispose du temps et des ressources pour le faire.
En conclusion, la post-édition est une réponse immédiate à la traduction de certains contenus. Mais celle-ci ne permet pas toujours de réaliser l’économie escomptée. En effet, le temps passé à faire soi-même peut être nettement supérieur à l’estimation de départ. Pour faire un calcul théorique du gain , il faut retenir que la post-édition permet une économie potentielle de 30% du temps de traduction. À la condition que votre « coût horaire » soit comparable à celui d’un traducteur professionnel. Si votre coût horaire est supérieur à 40€ il est fort à parier que l’internalisation sera plus coûteuse que l’externalisation.